Dans le cadre des Entretiens Franco-Allemands de Nancy (EFAN) 2023, organisés par la Métropole du Grand Nancy, les centres EUROPE DIRECT de Colombey-les-Belles, Esch-sur-Alzette (Luxembourg), Nancy et Sarrebruck (Allemagne) ont animé un rassemblement d’une centaine de lycéens et d’étudiants lorrains, sarrois et luxembourgeois le 28 mars après-midi, dans les locaux de la Métropole du Grand Nancy.
En s’inspirant des « conférences citoyennes » organisées par l’Union Européenne, les participants ont été invités à développer et partager des idées et solutions créatives pour une Europe plus durable en matière d’alimentation. Dans ce cadre, les jeunes participants ont été repartis en groupe autour de quatre enjeux essentiels : l’agriculture et la production de denrée, la réduction du gaspillage, la préservation de la biodiversité et la question de la souveraineté alimentaire et les échanges internationaux de denrées. Le but de ces ateliers en petits groupes : découvrir, échanger et développer des propositions.
Dans le cadre de l’atelier « souveraineté alimentaire » animé par notre centre EUROPE DIRECT, les participants se sont penchés sur la question « qu’est-ce qu’évoque pour vous, la souveraineté alimentaire ? ». Ainsi, plusieurs termes ont été évoqués comme la notion de « sécurité alimentaire », de « production écologique/biologique » en lien avec la « protection de l’environnement ». Les expressions de « circuits courts », « autonomie alimentaire » et « accès à l’eau et à la terre » ont également été mentionnés par les participants.
Source de nombre discussions, ce sujet est actuellement un élément essentiel de la politique de l’Union Européenne. À la suite de l’invasion injustifiée de l’Ukraine par la Russie, l’approvisionnement de denrée s’est trouvé très perturbé et à inviter les Européens à réfléchir à la façon de garantir leur souveraineté alimentaire dans un contexte international compliqué. Les enjeux sont aujourd’hui nombreux : sécuriser l’approvisionnement alimentaire de l’Europe et dans le même temps parvenir à la neutralité climatique à l’horizon 2050 en faisant la transition vers une agriculture plus durable.
De nombreuses mesures ont déjà été prises par l’Union européenne pour concilier agriculture durable et souveraineté alimentaire. On pourrait notamment évoquer l’adoption du Pacte Vert européen dont l’objectif est de faire de l’Europe le premier continent climatiquement neutre en émissions de CO2 d’ici à 2050 ou encore l’adoption de la stratégie « de la ferme à la table » qui constitue là aussi un changement majeur. Celle-ci prévoit la réduction de 20% de l’utilisation d’intrants, la réduction de 50% de l’utilisation des pesticides chimiques, l’augmentation des surfaces consacrées à l’agriculture biologique pour parvenir à 25%. De plus, dans le cadre de la protection de l’environnement et du climat, au minimum 30% des fonds consacrés à la politique régionale de l’UE doivent répondre aux enjeux de la transition vers une économie sobre en carbone et 40% du budget de la PAC devrait contribuer à l’action pour le climat, tout en venant en aide aux agriculteurs.
Cet atelier relatif à la souveraineté alimentaire a aussi été l’occasion d’échanger sur ce thème et de faire un premier constat avec un quizz numérique. Celui-ci traitait notamment des questions d’importations de denrées et du rôle que joue l’Union européenne en tant que première puissance agricole mondiale. Les élèves et étudiants ont répondu à une dizaine de questions portant sur : la proportion de fruits et légumes consommés en France qui sont importés (50%) ou encore, le pays contribuant le plus à la production agricole européenne (la France). Ces questions ont permis aux participants de mieux appréhender la notion de souveraineté alimentaire et d’obtenir des informations clés du contexte et des enjeux, pour alimenter par la suite un « World-Café ».
Séparé en petit groupe, les participants ont été invités à discuter autour de trois questions fondamentales autour de la notion de « Souveraineté alimentaire » afin d’énoncer des propositions autour de ces enjeux majeurs.
Pensez-vous que les « clauses miroir » qui prévoient d’intégrer dans les accords commerciaux de l’UE avec les pays tiers, l’application des normes sanitaires et environnementales de l’Union aux produits agricoles et agroalimentaires importés hors de l’UE soit une bonne chose, si oui/non pourquoi ?
Quelles mesures seraient, selon vous, les plus efficaces pour assurer une concurrence équitable entre les agriculteurs européens et hors de l’Union européenne ?
A cette question les participants estiment que les clauses miroirs sont de bons moyens de protéger le secteur agricole afin de s’inscrire dans une agriculture plus durable. Elles permettent de rester compétitif en assurant une égalité de traitement entre les agriculteurs européens et hors Europe. Celles-ci sont aussi nécessaires pour garantir que les deux parties respectent leurs engagements.
Néanmoins, il a été mentionné la nécessité de mettre en avant un commerce équitable sans pesticides et davantage soutenir les agriculteurs les plus pauvres tout en apportant de l’aide aux productions qui sont en crise.
Selon vous, l’Europe est-elle en capacité d’assurer sa souveraineté alimentaire?
En prenant en compte les enjeux climatiques liés à la production agricole, d’une population mondiale en augmentation et le contexte de guerre en Ukraine, quel rôle devrait jouer l’UE à l’avenir en tant que producteur de denrées alimentaires à l’échelle mondiale / en tant que première puissance agricole mondiale ?
Pensez-vous que dans ce contexte, l’UE arrivera à tenir ses engagements pour le climat (stratégie Farm to Fork, Pacte Vert…) ? Si oui, sous quelles conditions? / Si non, pourquoi?
D’après les participants, l’Europe a la capacité d’assurer sa souveraineté alimentaire et de produire de façon écologique. Elle est une puissance agricole composée de pays développés qui ont les capacités de mener à bien cette transition.
Il faudrait néanmoins produire plus localement et diversifier les sources d’approvisionnement de l’Union européenne (pays partenaires) pour éviter de se retrouver dans une situation de pénurie en cas de défaut d’un fournisseur comme ça été le cas avec la guerre en Ukraine.
Pour garantir la souveraineté alimentaire, il faudrait aussi veiller à lutter contre le gaspillage. Cela passe par une diminution de la quantité produite et une amélioration de la qualité en changeant les méthodes de production.
Enfin, il est nécessaire de lutter contre les situations de monopole afin d’éviter qu’un seul acteur ait trop de poids et qu’il puisse déstabiliser tout le processus.
Face aux différents enjeux posés par l’agriculture (environnementaux, économiques…), quelles idées et solutions innovantes voyez-vous pour repenser les modes de production et d’approvisionnement et ce à l’échelle locale, transfrontalière et européenne?
Les jeunes participants ont ainsi émis plusieurs propositions et notamment le soutien à la création de fédérations afin que les petits producteurs aient plus de poids. Pour augmenter leur influence, l’idée serait aussi de développer et d’améliorer la communication des producteurs locaux afin de leur donner plus de visibilité dans les grandes surfaces. Parallèlement, le développement de magasins ne vendant que des produits bio locaux permettrait de soutenir les petits producteurs.
Enfin, il s’agirait de lutter plus efficacement contre les situations de monopole qui peuvent empêcher les producteurs locaux de se développer. Cela passe par le soutien des paysans et l’investissement dans les infrastructures comme les coopératives.
Fort de ces réflexions, les élèves ont enfin pu échanger avec les personnalités invitées pour l’occasion : Cécile GAJATE, Policy Officer à la Direction-Générale de l’Industrie de la défense et de l’espace à la Commission européenne (DG DEFIS) qui a abordé la thématique de l’agriculture de précision et Charles THOMASSIN, Animateur du Réseau PARTAAGE – Transition alimentaire, au sein de l’association Citoyens & Territoires Grand Est qui a présenté les Projets Alimentaires Territoriaux menés sur le territoire français.
Cet évènement a été organisé avec le soutien de la Commission européenne, de la Région Grand Est, de la Métropole du Grand Nancy et de l’OFAJ.